Notes prises en écoutant l’interview de JC RUFIN par Claire
CHAZAL sur Radio classique, le 20/04/2013.
« Ce n’était pas un rêve, j’ai eu besoin de faire une
coupure, de m’abstraire ! Dès lors que l’on touche à cette affaire-là,
c’est un virus, le chemin vous conduit vers lui, vous pousse, vous tire. Ce
diable de chemin, c’est un peu sacrilège, a un côté diabolique ! Même si
on en a marre, il vous happe, il n’est alors plus question de ne pas aller au
bout! »
« Marcher tous les jours pendant 30 à 40 kms, une
espèce de monotonie apparente mais qui recouvre une diversité, on s’ouvre à
cette diversité. »
« J’avais passé 3 années un peu artificielles.
L’ambassadeur de France au Sénégal, c’est un peu le Reine d’Angleterre. »
« Le chemin c’est se déprendre d’un certain nombre de
charges, l’acceptation du dépouillement, la réconciliation avec soi-même. Au
lieu de subir, on s’accorde. »
« Je ne prenais pas de notes. Le travail de la mémoire
est un travail créatif et affectif. Les notes ne servent à rien. On retrouve
les choses importantes, et avec les guides, tout revient. »
« Sur les 800 kms d’Hendaye à Compostelle, le paysage
n’est pas là pour faire plaisir au pèlerin. Il est la vie, comme le chemin. Le
subir fait partie de l’épreuve. Ce qui m’a le plus séduit c’est le Pays basque
qui s’est protégé du boom immobilier. Mais des villages se vident, des
lotissements n’ont pas de clientèle, en marchant aux pas, on s’imprègne, c’est
la vie, c’est un peu la mort aussi, c’est très poétique, j’ai beaucoup aimé.»
« Chaque jour on porte sur le dos, dans le sac, la
mochilla, notre monde, notre vie. Le choix des éléments transportés renvoie à
des choses très profondes. Chacun réagit avec ses peurs : le poids
concentre les peurs. On finit par ne plus avoir que l’essentiel. C’est une
forme de clochardisation sociale (elle se fait en groupes et donc elle a des
limites). Elle se poursuit après le retour. Le pèlerin vide les choses
superflues même dans sa vie. »
« Si c’est possible, il faut faire ce chemin le plus
long possible dans la continuité, seul. Car il y a des transformations qui
s’opèrent et qui ne peuvent pas se produire autrement. »
« La solitude ne m’a pas pesé, elle aide à porter le
sac à dos. »
« Avec le détachement, on communique
différemment : c’est un peu benêt, on est un peu stupide, il y a une
facilité, un naturel, mais c’est assez superficiel aussi, à l’image de 2 sangliers
qui se rencontrent dans une forêt. Mais il y a aussi de vraies rencontres sur
le camino del Norte. »
« La première semaine le corps parasite la pensée. Où
vais-je bouffer ? Quid de cette ampoule ? Où vais-je trouver de
l’eau ? Puis, je me raccroche aux Eglises, aux monastères. Mais on touche
aussi à l’overdose. Il y a alors le détachement. On se rend compte que ce n’est
pas nécessaire de penser en permanence. Le pèlerinage a un côté bouddhiste dans
son essence. Il vous prépare, vous rend perméable à un approfondissement
spirituel, qui se fait en fonction de vos croyances. Ce n’est pas un chemin de
Damas. »
« Le chemin allait me convaincre, pour ne pas dire me
vaincre. Cela m’a aidé à me satisfaire d’avoir une seule vie. C’est une sorte
d’apaisement par rapport à soi-même. Vous n’avez qu’un chemin, vous devez
accepter son terme, il n’y a qu’une vie. On revoit, on revit les choses et on
les accepte surtout.
« Cela me permet de résister à la tentation. Je suis
plus exigent. Je ne veux plus être en représentation. Est- ce que j’ai envie de
mettre ça dans un sac à dos ! Comment remplir son sac à dos ? »
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